DE Nombakélé ou j’avais grandi, Libreville se transformant, mon père et ma mère avaient déménagé pour Akébé. Etudiant à Strasbourg, en vacances à Libreville, je découvris alors leur nouvelle maison, modeste et accueillante. A leur table, je retrouvai deux de leurs neveux, Jean Pierre MBOUROU APERANO et Faustin ONANGA, encore en vie aujourd’hui, et un compatriote dont à vue d’œil j’étais l’aîné. Des échanges qui suivirent, je compris très vite que ces trois-là s’entendaient comme larrons en foire, qu’ils avaient vécu un certain temps avec mes parents et que celui qui me fut présenté comme Albert YANGARI était le plus turbulent, à la fois boute-en-train et chef de file. Je sus aussi qu’on lui passait, dans cette famille, tous ses caprices, parce que, enfant d’une autre famille. C’est ainsi que je fis la connaissance d’Albert YANGARI.
Bien souvent, ce sont les enfants qui amènent leurs copains aux parents. Mais là, ce sont les parents qui furent à l’origine de notre relation. Une relation qu’Albert, tout au long de notre vécu, a nourri de son extraordinaire et constante générosité, de son sens inné du partage, de son ouverture à l’autre. Ouverture à l’autre au-delà de toute considération ethnique, culturelle, sociale, religieuse. Engagé, discert dans les échanges, enflammés dans les propos, l’humour d’Albert à facettes multiples donnait toujours de l’espace au dialogue, à la tolérance, pour faire évoluer le débat. Ouverture à l’autre, contre vents et marées parce qu’Albert avait sorti de son vocabulaire le mot exclusion.
D’autres l’ont fait également, qu’ils soient de plus en plus nombreux à le faire. Albert, le cercle de tous ceux qui te pleurent aujourd’hui dans la diversité de ses composantes rend assurément hommage à l’homme des médias et de culture que tu as été, au ministre du Tourisme, au cœur de la construction du Ré-Ndama de Libreville et du Léconi Palace à Franceville. Mais aussi, un artisan actif, dynamique et constant de la liberté et du Vivre-Ensemble.
Premier Directeur général du premier quotidien national baptisé L’Union, n’y avait-il pas là un clin d’œil à l’exemplarité qui fut la tienne dans cette indispensable construction du nécessaire vivre- ensemble ? D’Akébé en 1966 à ce triste réveil d’un matin morne et douloureux de novembre 2023 en son 18e jour, l’histoire s’est écrite, mais profonde est demeurée notre amitié, enrichissante notre fraternité et constante notre solidarité. Et nous avons préservé le legs familial de nos parents. L’espace et le temps que tu as traversés ne nous sépareront point, car l’Infini nous rassemblera toujours. Alors, va échanger avec ceux qui nous ont précédés, et avec ton humour à saveur d’orange amère rends leur compte de notre histoire, de notre vécu, des espoirs et des espérances qu’il porte.
Repose en paix, mon frère.
Et à tout moment !
Par Michel ESSONGHE