Recapitalisation obligatoire des établissements de micro-finance (EMF) d'ici à 2021, renforcement des contrôles internes, nomination des administrateurs aux profils adaptés, reportings exacts des Commissaires aux comptes... La réforme réglementaire sur la micro-finance va bouleverser les mauvaises habitudes et assainir le secteur. La Cobac a animé un séminaire à Yaoundé cet effet.
C’EST une réforme majeure, après celle de 2002, qui s’amorce dès cette année dans le secteur de la micro-finance en Afrique centrale. Mardi 26 janvier 2018, à l’hôtel Mont-Fébé (Yaoundé), la Commission bancaire de l’Afrique centrale (Cobac) a rendu public le nouveau dispositif réglementaire aux conditions d’exercice et de contrôle de l’activité de micro-finance, au sein de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cémac).
Afin de permettre une meilleure appropriation des points saillants des nouveaux textes par les acteurs de la micro-finance, textes soumis à l’appréciation des différentes parties prenantes réunies en consultation à Libreville les 24 et 25 novembre 2016, avant qu’ils ne soient adoptés le 27 septembre 2017 à Douala par le comité ministériel de l’Union monétaire d’Afrique centrale, la Cobac a donc organisé, le 26 juin dernier, un cadre d’échanges, d’expériences et de connaissances autour de trois thèmes pour autant de panels de discussion. A savoir : (1) « les règles de constitution, activités autorisées, agrément et modification de situation juridique », (2) « le gouvernement d’entreprise, le contrôle interne et la supervision des EMF », enfin, (3) « le traitement des créances et les activités des commissaires aux comptes ».
A mentionner, la bonne prestation de deux EMF gabonaises, panélistes du deuxième thème. En effet, Patrice Ndiaye Kassangoye, directeur général de Loxia EMF, a permis de comprendre la nouvelle organisation du dispositif du contrôle interne dans les EMF et le traitement de l’information, le système de mesure de risques et des résultats. Quant à Mme Marie-Louise Bita, directeur général de Express Union Gabon, elle a fait le partage d’expérience quant au gouvernement de l’entreprise qu’elle administre, le contrôle interne et la supervision.
Devant près de 400 dirigeants d’établissements de micro-finance (EMF), des commissaires aux comptes, des représentants des autorités monétaires, d’universitaires et de journalistes, Abbas Mahamat Tolli, président de la Cobac, a déclaré que l’entrée en vigueur du nouveau cadre réglementaire va induire des mutations profondes sur la situation des EMF. « Tant au plan du développement de l’activité de la micro-finance, qu’à celui de l’encadrement et de la supervision du secteur dans la Cémac ».
Les changements majeurs qu’implique le nouveau cadre des EMF concernent l’organisation de l’activité des EMF, notamment la suppression des EMF indépendants de la première catégorie, désormais réservée exclusivement aux établissements en réseaux, la forme juridique des EMF, le régime des agréments, des autorisations préalables, le capital social minimum désormais exigé des EMF, le gouvernement des entreprises de micro-finance, leur contrôle interne, ainsi que le traitement des EMF en difficulté.
« Le cadre réglementaire actuel mis en place en 2002 a montré ses limites. Les résultats des différentes enquêtes sur place diligentées par la Cobac auprès des établissements de microfinance ont mis en exergue plusieurs faiblesses du dispositif en vigueur », a dit Abbas Mahamat Tolli.
Ces faiblesses englobent notamment « la gouvernance des établissements de micro-finance, les formes juridiques associées à chaque catégorie d’EMF, les modalités de modifications de leur situation juridique, le dispositif de contrôle interne, le rôle des commissaires aux comptes et les normes prudentielles », a-t-il expliqué.
Pis, la dégradation des portefeuilles de certaines EMF, leur manque de viabilité, la cessation des activités suite à des défaillances graves, ont montré la nécessité de renforcer la surveillance du secteur car, dira-t-il, « certaines contre-performances sont susceptibles de mettre à mal la stabilité financière de la sous-région ». La Cémac compte, en effet, 700 établissements de micro-finance agréés, dont les données cumulées font ressortir un total bilan de 1 158 milliards de francs, un total de dépôt de 907 milliards, et des encours crédits bruts de 582 milliards de francs, au 31 décembre 2017.
La Cobac a accordé un délai de deux ans maximum aux EMF, à compter du 1er janvier 2018, afin que toutes se conforment au nouveau cadre réglementaire, A titre d'exemple, la recapitalisation par palier des EMF de 2e et 3e catégories est une exigence. Autrement dit, pour les EMF de 2e catégorie, passer de 50 à 100 millions de francs en janvier 2018, puis à 300 millions au 1er janvier 2021, et, pour les EMF de 3e catégorie passer de 25 millions à 50 millions au 1er janvier 2018, avant de terminer à 150 millions de francs au plus tard le 1er janvier 2021.
Innocent M’BADOUMA
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